Ton briquet
Combien de mains en paravent
De ronds de fumée s’élevant
Quelle chaleur, quelle lumière
Au roulement de cette pierre
Quelle amitié se réchauffant
Dans cette nuit qui s’en défend
Quelle brûlure au bout des doigts
Quelle mèche, quel petit bois
Dans ce briquet, tout vieux, tout moche
Tout juste tombé de ta poche
Combien de cierges, de chandelles
Et d’espoirs dans une étincelle
De convoitises de gamins
D’« À mettre hors de portée de main »
Quel feu aux poudres, quel pétard
Quel ogre réclamant sa part
Quel feu de camp, quel bois de liane
Entre quell’s mains de cleptomane
Dans ce briquet, tout vieux, tout moche
Tout juste tombé de ta poche
Combien d’artificiers perplexes
Dans sa mémoire de silex
Quelles vessies pour des lanternes
Quell’ fierté d’homme des cavernes
Quel Molotov, quel jerrycan
Dans ce rêve de pyromane
Quell’ mise à feu, de quel conflit
Quel tas de cendre, quel défi
Dans ce briquet, tout vieux, tout moche
Tout juste tombé de ta poche
Combien de bouquets d’artifice
Quelle lueur, quel maléfice
Quel goût de suie, quel incendie
Quel goût encor’ de l’interdit
Quell’ volonté du condamné
Quel feu d’enfer pour les damnés
Quelle ombre chinoise ventrue
Ou quel foyer selon Landru
Dans ce briquet, tout vieux, tout moche
Tout juste tombé de ta poche
Combien d’étoiles dans les yeux
Quand on te demande du feu
Quel embrasement de nos sens
Dans ces quelques gouttes d’essence
Quel photophore à ton rivage
Quel lamparo guidant ta nage
Quell’ dernièr’ chanc’ dans la tempête
Ou quel lampion des soirs de fête
Dans ce briquet, tout vieux, tout moche
Tombé de l’âtre de ta poche
Auriez-vous du feu s’il vous plaît
Juste pour voir le vent qu’il fait
Une allumette, une étincelle
Un bout de cœur, une parcelle
Philippe Thivet
(06/12/2024)