La lune pour complice

Ne cherchez pas demain mon ombre par ici
Aux flux artificiels des lueurs que voici
On l’aura vue ce soir la lune pour complice
Se glisser dans la nuit par quelques interstices

Était-ce un sac à dos à son ombre chinoise
Ou le dessin mouvant d’une touffe d’armoise
Était-ce un pas de danse au reflet d’une flaque
Ou le jeu dans les branch’s d’une brise insomniaque

Ne cherchez pas demain mon ombre ton sur ton
Perdue sous l’œil éteint d’un quelconque maton
On l’aura vue glisser à l’entre chien et loup
Laissant son manteau gris accroché à un clou

On la dit en chemin sans nulle autre pareille
Prête à réanimer s’il le faut le soleil
Ou même à rassembler quelques bouts de chandelles
Pour se faire un halo où déployer ses ailes

Ne cherchez pas demain mon ombre aux alentours
Au confort tamisé de quelques abat-jours
On l’aura vue glisser sous un rayon de lune
Offrant aux alizés son gréement de fortune

Qu’on la veuille passante, errante ou vagabonde
À son désir d’envol l’étincelle est féconde
Et déjà le silex qui roule sous ses pas 
Réinvente le feu que l’on attendait pas

Ne cherchez pas demain mon ombre pâlichonne
Aux lueurs hypnotiques de votre téléphone
On l’aura vue partir sans y laisser d’adresse
Dansant dans le ressac de vos feux de détresse

Était-ce une grand-voile ou l’étoffe d’un rêve
Se gonflant d’horizon dans le vent qui se lève
Est-ce un pas de côté ou même le grand saut
Ce canal endigué qui se rêve ruisseau

Ne cherchez pas demain mon ombre par ici
Aux flux artificiels des lueurs que voici
On l’aura vue ce soir la lune pour complice
Se glisser dans la nuit par quelques interstices

Philippe Thivet
(07/05/2020)

 

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