Camille
Camille
En ce temps-là les filles
Camille
Ne jouaient pas aux billes
Camille
Quant à être statuaire
Il valait mieux le taire
Que les filles modèles
N’attendent pas grand-chose
Mademoisell’ Claudel
Ne prendra pas la pose
En fallait-il pour preuve
Qu’à votre propre école
La glaise de Vill’neuve
Prenne les traits de Paul
Camille
En ce temps-là les filles
Camille
Ne jouaient pas aux billes
Camille
Quant à sculpter des nus
Quelle idée saugrenue
Si quelques salonnards
Engoncés dans l’époque
Détournaient le regard
Quand vous domptiez le roc
Du prix de vos efforts
À la folie furieuse
Pour y trouver de l’or
Vous fûtes orpailleuse
Camille
En ce temps-là les filles
Camille
Ne jouaient pas aux billes
Camille
Votre Valse pourtant
Revient à contretemps
Ce n’est qu’en mouvement
Que l’idée prenait corps
Et ceux de vos amants
S’arrachent au décor
Tant leurs cœurs palpitaient
Sous vos poings s’activant
Le marbre ne pouvait
Que devenir vivant
Camille
En ce temps-là les filles
Camille
Ne jouaient pas aux billes
Camille
Quand même la laideur
Ne vous faisait pas peur
L’onyx entre vos mains
N’était que plus précieux
Vos Causeuses n’ont rien
À nous dire de mieux
Que votre regard bleu
Tout à coup vire au noir
Votre Clotho ne peut
Que nous tendre un miroir
Camille
En ce temps-là les filles
Camille
Ne jouaient pas aux billes
Camille
La révolte du reste
Éclairait tous vos gestes
Suppliante, orgueilleuse
Vous fûtes tout cela
Votre passion rageuse
Ne laissant rien à plat
Quelque soit le modèle
Qu’il soit support du rêve
D’aucun maître, rebelle
Vous ne fûtes l’élève
Camille
En ce temps-là les filles
Camille
Ne jouaient pas aux billes
Camille
Mademoisell’ Claudel
Que l’art se le rappelle
Vous, la sœur en exil
Emportant son mystère
Indomptable et fragile
Mais femme à part entière
Camille
En ce temps-là les filles
Camille…
Philippe Thivet
(Alentours de Ville-Évrard, 18/11/2020)