Corvus corax
L’oiseau de mauvais augure
Que l’on cloue au pilori
Croasse dans les ramures
D’aucuns vous diraient qu’il rie
Sous son nom à l’encre noire
La plume du délateur
A souvent tagué l’histoire
Au tableau du déshonneur
Quand d’autres pour un fromage
En ont fait l’idiot des bois
Gageons que leur beau ramage
N’était que mauvaise foi
L’oiseau de mauvais augure
Que l’on se plaît à haïr
Croasse sur les hauts murs
Dans son inquiétant sabir
Et l’on charge l’animal
De nos desseins les plus sombres
Incarnant ainsi le mal
À l’aplomb de nos décombres
Quand le trophée des vainqueurs
Est sang versé sans vergogne
C’est à croire que nos cœurs
Lui disputent la charogne
L’oiseau de mauvaise augure
Qu’on accable de nos peurs
Croasse sur nos cultures
En riant de sa blancheur
Que Noé ou Apollon
En aient fait cet ange noir
Cela nous en dit bien long
Sur ce que l’on aime croire
À l’ombre de nos clochers
Où grincent les girouettes
Inutile de chercher
On accuse aussi la bête
L’oiseau de mauvais augure
Que l’on renvoie aux ténèbres
Croasse sur nos futurs
Un air de marche funèbre
Qu’il vienne en ombre chinoise
Effleurer notre géo
On rajoute à son ardoise
Le poids du dernier fléau
Quand le corbeau d’Allan Poe
Entonne son, jamais plus
Le chant gris de nos appeaux
Peut prier pour nos saluts
Est-c’ que cela nous rassure
De clouer au pilori
L’oiseau de mauvais augure
Que l’on couvre de nos cris
Que bien le bonjour d’Alfred
Les oiseaux mènent le monde
Nous la trouverions bien raide
L’histoire de cette fronde
Quand sur nos vertes prairies
Viendront danser les corbeaux
Aurons-nous enfin compris
Que l’on volait sur le dos
Philippe Thivet
(02/11/2021)