Fréhel
Il éteint son mégot, remonte un peu son col
Son cass’-croûte d’insect’s replié dans sa toile
De la buée aux carreaux, un peu de sel qui colle
Il reviendra ce soir veiller sous les étoiles
Toujours droit comme un i malgré le poids des ans
Le vieux veilleur de nuit revient par tous les temps
La vieille sentinelle
Le vieux phar’ de Fréhel
Il a fini sa nuit, rassemblé ses moutons
Quelques pierr’s à ses pieds font quelques ronds dans l’eau
Pas de quoi fair’ grand bruit sous le soleil breton
Mais c’est une autre histoir’ quand le soleil prend l’eau
Il salue l’horizon d’un tout dernier clin d’œil
On murmure son nom au banquet des écueils
La vieille sentinelle
Le vieux phar’ de Fréhel
Une odeur de café près du bistrot du Port
On parle un peu de lui, de ses hauts faits de mer
On trinque à sa santé et on retrinque encore
On s’y tient froid l’été, s’y réchauffe l’hiver
On voit passer son ombre au coin des rues parfois
On s’estime du nombre des vies que l’on lui doit
La vieille sentinelle
Le vieux phar’ de Fréhel
Il remet son monocl’, ses moutons sont lâchés
Une nuit agitée s’annonce à la radio
Il vacill’ sur son socl’, mais ne va rien lâcher
L’océan ça n’est rien que du sel et de l’eau
Toujours droit comme un i malgré le cri du vent
Le vieux veilleur de nuit tient bon par tous les temps
La vieille sentinelle
Le vieux phar’ de Fréhel
Pour un coup de tabac il rallume son feu
Un morceau de Beaufort calé dans sa musette
Il sait que le combat qui se joue sous les cieux
Se joue à la lueur de sa lampe-tempête
Il balaie l’horizon d’un vigilant coup d’œil
On murmure son nom au banquet des écueils
La vieille sentinelle
Le vieux phar’ de Fréhel
On parlera de lui demain sur le comptoir
Le café sera fort, peut-être un peu salé
Le vieux veilleur de nuit, lui le boit toujours noir
En pensant à ces grains qu’il a fallu passer
On salu’ra son ombr’ dans les rues de guingois
On se saura du nombre des vies que l’on lui doit
La vieille sentinelle
Le vieux phar’ de Fréhel
Philippe Thivet
(GR 34, 21/05/2015)