Le petit monde des gens bien

Le rideau s'ouvre sur le monde,
Le petit monde des gens bien,
Voici qu'ils entrent dans la ronde
De leur manège quotidien.

Dans le cercle des dirigeants,
De grandes pontes en cheffaillons,
Chacun régnant superbement
Du haut de sa situation.

Et de courbett's en ronds de jambes,
On se déteste aimablement,
Entre messieurs qui se ressemblent
Au petit jeu des importants.

Et ainsi va le monde,
Le petit monde des gens bien.

Et chacun tremble pour sa place
A convoiter celle d'un autre,
On se méprise, on se surpasse,
A grands coups de « cordial'ment votre. »

Tantôt toutou devant le boss,
A qui l'on s'efforce de plaire,
Tantôt hautain, souvent féroce,
Pour tous les rôles secondaires.

Bien sûr on se flatte d'avoir
Quelques valets un peu zélés,
Les sombres allées du pouvoir
Ont bien besoin de cantonniers.

Et ainsi va le monde,
Le petit monde des gens bien.

« Mais après vous, je n'en f'rai rien »,
On s'assassine poliment,
Les financiers veillent au grain,
Pas de temps pour les sentiments.

La courtoisie des jeunes loups,
Recalculée à chaque instant,
Est un plac'ment au moindre coût,
Et qui vaut bien des coups de dents.

L'humanité mise au vestiaire
A l'école des ambitieux,
Et la revanche en bandoulière,
Chacun existe comme il peut.

Et ainsi va le monde,
Le petit monde des gens bien.

Philippe Thivet
(08/11/2003)