La libellule et le funambule

Ne te découvre pas d’un fil
Lui dit la libellule
Quand dans le ciel d’avril
Passe le funambule

On est équilibristes
Du haut de nos tournis
L’ombrelle de l’artiste
Nous tient au bord du nid

Tout ne tient qu’à cela
Ce fil à notre patte
Qu’il ne soit qu’entrelacs
Ou filin d’acrobate

Sur l’échelle du temps
La grenouille coasse
L’averse sur l’étang
L’invite à quelques brasses

On nage entre deux eaux
Parapluie à la main
Mi-pierre, mi-crapaud
Aux flaques du chemin

Et si la goutte d’eau
Fait déborder la vase
Elle a toujours bon dos
La larme qu’on écrase

Ne te découvre pas d’un fil
Lui dit la libellule
Quand dans le ciel d’avril
Passe le funambule

Les dictons quelquefois
Nous font tomber de haut
Si l’on accorde foi
À leurs grands idéaux

Et si mai revenait
Que ferions-nous de plus
Le printemps qui renaît
Doit tant aux cumulus

Il n’y a plus de saisons
À l’abri des comptoirs
Mi-figue, mi-raison
Chacun refait l’histoire

Et si mars y giboule
En plein cœur de juillet
Oyez le chœur des foules
Vous dire, j’y étais

Là-bas l’été indien
Y laisse quelques plumes
Quand le colon qui vient
S’emmitoufle de brume

Ne te découvre pas d’un fil
Lui dit la libellule
Quand dans le ciel d’avril
Passe le funambule

Philippe Thivet
(16/04/2020)