La solitude

C'est la source fertile,
Où l'on se noie parfois.
C'est le poids de l'exil
En plein cœur de chez-soi.
C'est la force tranquille,
Qui nous tient, qui nous broie.
Et l'espoir versatile,
Qui s'en va de guingois.

C'est cent milliards d'étoiles
Eteintes une à une.
C'est l'ombre à rebrouss'-poil
De nos pas sous la lune.
C'est un trou dans la voile
D'un radeau de fortune.
Le regard qui se voile
D'un quelqu'un sans quelqu'une.

La solitude, la solitude.

C'est le temps retrouvé
De nos rêves d'enfant.
C'est le cri réprouvé,
Qui revient triomphant.
C'est la douleur couvée
Dans l'âme qui se fend.
Le point faible trouvé,
Dont chacun se défend.

C'est les yeux de la foule,
Qui se noient dans le vide.
C'est l'aveu que déroule
Chacune de nos rides.
C'est le fou qui se soûle
Pour demeurer lucide.
Le lis'ron qui s'enroule
Dans le cœur du timide.

La solitude, la solitude.

C'est l'occasion rêvée
De n'être que soi-même.
C'est la braise avivée
D'une vie de bohème.
C'est la beauté larvée
De notre requiem.
L'amour inachevé,
Dont on se sort indemne.

C'est la mine précieuse
Où personne ne pioche.
C'est la voix silencieuse
Balançant ses reproches.
C'est le pas des valseuses,
Qui jamais ne s'approche.
La monnaie de l'ouvreuse
Tout au fond d'une poche.

La solitude, la solitude.

C'est l'effet et la cause
De nos cœurs insurgés.
C'est la force des choses,
Dont on s'est arrangé.
C'est l'ennui qu'on arrose
Pour mieux le vendanger.
La beauté d'une rose,
Qu'il reste à partager.

Philippe Thivet
(25/08/2006)