Les pachas endormis

Les dat's anniversaires
Sont des pierr's que l'on sème
Pour ne pas s'égarer.
Ell's nous prenn'nt à revers
Quand quelques chrysanthèmes
Viennent les célébrer.

Les années sont passées,
Apaisant's et trompeuses,
Emportées par la vie,
Faisant min' d'effacer
Dans leurs flamm's oublieuses,
L'ombre de l'ici gît.

Mais la vieille blessure
Que l'on pensait fermée,
Revient à fleur de peau,
Nous redir' les brisures
Qui nous ont transformés,
Bien au-delà des mots.

Cette petite absence
Qu'on garde au fond de soi,
Prête à nous envahir.
Cet abîm' de silence
Où résonn'nt à la fois,
Nos douleurs et nos rires.

Beaux pachas endormis
Aux creux de nos errances,
Les morts ont la bell' vie,
Quand on y pense.

Il y a bien longtemps
Ou n'était-ce qu'hier ?
Nous n'étions mêm' pas morts.
Je mesure à présent
La faveur éphémère
D'être vivant, encore.

Et même plus fragile
Sous quelque carapace,
Je revis de bon cœur.
Mes fantômes dociles
Hantent le temps qui passe,
Mais ne me font plus peur.

Mes souvenirs émus
Venus se ressourcer
Aux traits d'une photo,
Sav'nt le jeu ambigu
De chaque jour passé
Où les morts jouent leur peau.

Moi qui ne crois en rien
Je leur parle souvent
En regardant le ciel.
C'est con, mais il faut bien
Pouvoir de temps en temps
Se donner des nouvelles.

Beaux pachas endormis
Aux creux de nos errances,
Les morts ont la bell' vie,
Quand on y pense.

Un petit vide ici,
Une larme en passant,
Pauvre petit mortel,
Mes pachas endormis,
Je pense à vous souvent
En regardant le ciel.

Philippe Thivet
(03/01/2003)