Mona

Ce n' sont que des copeaux
A peine un peu de sciure
Dont le prix au kilo
Relèv' de l'imposture
Ce trop fameux tableau
Qui trône sur son mur
Nous regardant de haut
Sous toutes les coutures

Ce n'est rien qu'un sourire
Sur le bout d'un pinceau
Même pas un vrai rire
Au feutre ou au stylo
Cet objet du désir
Sachant trop ce qu'il vaut
Semblant vouloir nous dire :
Que savez-vous du beau ?

Ainsi vois-tu Mona
Pas de quoi pavoiser
La Joconde est en bois
En bois de peuplier
Ainsi vois-tu Mona
Pas de quoi se pâmer
Les chefs-d'œuvre parfois
Ont tout à nous envier

C'est un portrait de femme
En tenue de saison
Pas de quoi fair' un drame
De ce photomaton
Ce visage où se trament
Les plus folles passions
Prêtées à cette dame
Qui ne nous dit pas non

C'est un livre d'histoire
Qui ne dit pas un mot
Aimant à se fair' voir
Dans les palais royaux
Ce grand jeu de regard
Ameutant les badauds
Pourtant mieux vaut l'avoir
En pension qu'en photo

Ainsi vois-tu Mona
Pas de quoi pavoiser
La Joconde est en bois
En bois de peuplier
Ainsi vois-tu Mona
Pas de quoi se pâmer
Les chefs-d'œuvre parfois
Ont tout à nous envier
C'est un si doux minois
Mais que le temps menace
Que travaille le bois
Et la peau se crevasse
Cette femme aux abois
Dans sa prison de glace
Aimerait bien parfois
Pouvoir céder sa place

Ce n'est qu'une people
Au pays des artistes
La victime d'un vol
Qui l'a remise en piste
Ce portrait qui racole
L'esthète et le touriste
Sait que l'art fait école
Et que la chair est triste

Ainsi vois-tu Mona
Pas de quoi pavoiser
La Joconde est en bois
En bois de peuplier
Ainsi vois-tu Mona
Pas de quoi se pâmer
Les chefs-d'œuvre parfois
Ont tout à nous envier

C'est un instant volé
Aux yeux de Léonard
Que pourrait-il penser
De toutes ces histoires ?

Philipe Thivet
(07/05/2009)