Comptes de fées

On a tant lu d'histoires,
A nous petites filles,
Que l'on aimerait croire
A ces héros qui brillent.

Ce n'est qu'un peu de vent,
Qui passe sous ma porte,
Le courrier que j'attends
Est resté lettre morte.
Mon tendre chevalier
Vit bien sur cette terre,
Mais son grand messager
Est un peu tête en l'air.

On nous a tant promis
De dentelle et de gloire,
Bien au chaud dans le nid
De notre tour d'ivoire.

Ce n'est que du crépon,
Qui tourne dans nos fêtes,
Les noces de carton
Font chanter nos défaites.
Ma pantoufle de vair
Attend qu'on la ramasse,
Mais il n'y a rien à faire,
Ce n'est qu'une godasse.

C'est à dormir debout
Toutes ces bell's histoires,
Que l'on a peu ou prou
Glissées dans nos mémoires.

Ce n'est qu'un peu de vent,
Qui caresse nos rêves,
Dans nos têtes d'enfants,
Et puis le jour se lève.
Un jour mon princ' viendra,
Je le sais, je le sens,
Mais je ne comprends pas,
Vraiment ce qu'il attend.

On a tant raconté
De ces nobles destins,
A nous enfants gâtées
Dans nos draps de satin.

Ce n'est rien qu'un quidam,
Qui passe par ici,
Ce bruit de pas, madame,
Déjà s'évanouit.
Le prince, dit « charmant »,
Est peut-être authentique,
Mais son cheval vraiment,
N'est rien qu'une bourrique.

On a mis dans nos cœurs
L'image d'Epinal,
De ce parfait bonheur,
De l'amour idéal.

Ce n'est qu'un pincement
Au fond de ma poitrine,
La flèche n'a vraiment,
Fait qu'une entaille fine.
Les sentiments si beaux,
Se ramass'nt à la pelle,
Mais Cupidon là-haut,
En a un coup dans l'aile.

J'ai refermé les livres,
Si doux de mon enfance,
Maintenant il faut vivre,
Pas si mal quand j'y pense.

Ce n'est qu'un peu de vent
Caressant les visages,
Giflant de temps en temps
Une joue au passage.
Et le prince charmant,
Qui m'attend pour de bon,
Déjà je l'aime autant,
Que son vieux canasson.

Oui les contes,
Les contes de fées,
Sont des comptes
A régler.

Philippe Thivet
(11/07/2005)