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Ouvriers

Lettres de bois, de fer,
Chantournées à la main
Ou sculptées dans la pierre
Qui vous brise les reins.

Ouvriers.

C'est un mot sur l'honneur
Qui nous revient de loin,
De larm's et de sueur,
De lutte et de chagrin.

C'est un mot sage et fier
Contre vents et marées,
Une fleur populaire
Eclose du pavé.

Ouvriers.

Lettres noir's de charbon
Ou battues comme plâtre,
Pour mieux vous dir' ce nom
Qui sait se mettre en quatre.

Ouvriers.

C'est un mot qu'on oublie,
Malgré tout ce qu'il vaut,
Les mains dans le cambouis,
Le travail dans la peau.

C'est un mot de la terre,
De la fonte et du feu,
Avalé de travers
Par un passé glorieux.

Ouvriers.

Lettres bell's, ouvragées
Ou taillées dans la masse,
Aux échos de l'acier,
Qui vous broie, qui vous casse.

Ouvriers.

C'est un mot sacrifié
Sur l'autel des finances,
Dont les roues bien huilées
Lui doiv'nt plus qu'ell's ne pensent.

C'est un mot que l'on pleure
Aux portes de l'usine
Qui se fait voir ailleurs,
Ne laissant que des ruines.

Ouvriers.

Lettr's à la trame usée,
En chantier permanent,
Cent fois sur le métier
Mise(s) inlassablement.

Ouvriers.

C'est un mot de misère
Echoué sur la grève,
Renfermant sa colère
Dans un poing qui se lève.

C'est un mot minuscule,
Qui roule entre les doigts
De ces mains majuscules
Qui en savent le poids.

Ouvriers.

Ce sont des hommes vrais
Dont on ne parle guère,
Accouchant les projets
Dont d'autres sont si fiers.

Philippe Thivet
(17/03/2006)