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Gare Montparnasse

Les chalutiers s'échouent à la gar' Montparnasse,
Tout au bout de ces rails où plus rien ne se passe.
L'océan par ici n'a plus grand-chose à dire,
Attendant que l'été veuille bien revenir.
Le ponant sur tribord,
Tu gardes au fond de toi
Ce souffle froid qui mord
En pointant du noroît.
Tu sais ces heures grises,
De granit et d'écume,
Quand plus rien n'a de prise
Dans ce pays de brume.

C'est au fond de ton sac, que par un jour d'automne,
Tu emportas, bien lourde, un peu de terr' bretonne.
Pour un peu plus de pain et quelques illusions,
C'est au bout de ces rails que tu vis l'horizon.
Aux frontons du quartier
Chant'nt encor' quelques noms,
Venus te rappeler
Ton bon pays breton.
Mais le phar' par ici,
N'est plus rien qu'une tour,
Qui se perd dans la nuit
Des néons alentour.

Port étrange
Où s'échange
Une vie pour une autre.
Drôl' de gare
Où s'égarent
Ces vies qui sont les nôtres.

Les chalutiers s'échouent à la gar' Montparnasse,
Tout au bout de ces rails où plus rien ne se passe.
La marée par ici n'est qu'une masse humaine
Où se noient chaque jour des milliers d'âm's en peine.
Toi tu sais l'avenir,
Que t'offrait ce pays,
Il faut savoir partir
Pour vivre enfin sa vie.
Qu'est le poids d'un exil,
Quand on ouvre les ailes ?
Les lumièr's de la ville
T'auront paru si belles.

Les voiliers par ici tiennent parfois salon,
A peine ballottés par le vent des camions.
La mer est un loisir qui se paie à prix fort,
Mais les pêcheurs pourtant ne voguent pas sur l'or.
Les vagues de l'automne
Ont d'étranges échos,
Quand déjà tu t'étonnes
D'être si loin des flots.
L'équinoxe là-bas,
Déchaîne ses vents fous,
La lune sur l'agenda
Lorgne tes rendez-vous.

Port étrange
Où s'échange
Une vie pour une autre.
Drôl' de gare
Où s'égarent
Ces vies qui sont les nôtres.

Les chalutiers s'échouent à la gar' Montparnasse,
Tout au bout de ces rails où plus rien ne se passe,
Que cette ancre jetée du haut de ses vingt ans,
L'éternelle aventur' de tous les conquérants.
Le sel au coin des yeux,
Tu regardes parfois
Filer cet acier bleu,
Qui ramène chez toi.
Ces racines de fer
S'étirent dans le vent,
Quoi que tu puisses faire,
Ell's te suiv'nt à pas lents.

Tu viens traîner souvent sur le quai des départs,
Quand l'appel du grand Ouest te ramène à la gare.
Voici le dernier train, qui part au bout du monde,
Il reviendra demain puisque la terre est ronde.
Et pourtant tout là-bas,
Court encore un enfant,
Un drôl' de petit gars,
Qui te ressemblait tant.
Et s'il court à présent
Sur les quais de la Seine,
A jamais l'océan
Coulera dans ses veines.

Port étrange
Où s'échange
Une vie pour une autre.
Drôl' de gare
Où s'égarent
Ces vies qui sont les nôtres.

Port étrange
Où s'échange
Une vie pour une autre.
Drôl' de gare
Où s'égarent
Ces vies qui sont les nôtres.

Philippe Thivet
(16/05/2005)