L'un contre l'autre

L'un contre l'autr' comptant les heures,
L'un contre l'autre et c'est peu dire.
A l'endroit où battait leur cœur,
Ils n'ont plus que des souvenirs.

Ell' le regarde sans y croire,
Il la regarde sans la voir,
Mais à quoi bon faire une histoire
De tout ce qui n'en est plus une.
Pour quelques gestes d'automates,
Qu'ils se dispensent à la hâte,
Il y a cette vie qu'ils ratent,
A ne plus s'en rêver aucune.

L'un contre l'autre pour le pire,
L'un contre l'autre face à face.
Juste à l'endroit de leur sourire,
Ne reste plus qu'une grimace.

Et leur amour en dents de scie,
En aura fini de scier
La branche où il était assis,
Et que rien ne faisait plier.

L'un contre l'autr' comptant les heures,
L'un contre l'autre et c'est peu dire.
Juste à l'endroit de leur bonheur,
Ne reste qu'un vide à remplir.

Il ne sait plus ce qu'ils étaient,
Ell' le conjugue à l'imparfait,
C'est leur histoir', mais ell' pourrait
Tout aussi bien être la nôtre.
Et du soleil à la grisaille,
Sans un orage et sans bataille,
Ils ont sombré vaille que vaille,
Sans même un mot plus haut que l'autre.

L'un contre l'autre à corps perdus,
L'un contre l'autre pour de bon.
A l'endroit où ils s'étaient plu,
Plus rien qu'une chape de plomb.

Et si leur cœur encor' balance,
Sur un tempo de lassitude,
Ils voient se réduir' la distance,
Qui ramène à la solitude.

L'un contre l'autr' comptant les heures,
L'un contre l'autre et c'est peu dire,
Juste à l'endroit des jours meilleurs,
Que cet ennui triste à mourir.

Qu' l'un contre l'autre l'on se livre,
Tout's les batailles que l'on puisse.
L'un contre l'autre il faut bien vivre,
Pourvu que nos peaux soient complices.

Philippe Thivet
(04/05/2005)