À moitié beaux

Dans ce théâtre d’ombres
Ils avançaient masqués
Quand ell’ l’a remarqué
Se distinguant du nombre

Si ils se sont souri
C’est sans pouvoir le voir
Ne soyons pas surpris
Qu’ils aient pu le savoir

Ils avaient dans les yeux
Ce petit quelque chose
Qui ne saurait dir’ mieux
Et l’effet, et la cause

Il est à moitié beau
Ell’ invente le reste
Dressant portrait-robot
Pour la beauté du geste

Dans cette pantomime
Ils avançaient sans bouche
Là, Cupidon les touche
En assumant son crime

Bien sûr c’est un cliché
Mais l’amour n’est que ça
Et touchés pour touchés
Admirons ces deux-là

Souligné de tissu
L’intime du regard
Disait à leur insu
Viens réclamer ta part

Ils sont à moitié beaux
Et c’est déjà énorme
Retenant bien au chaud
Leurs baisers qui se forment

Dans cette époque grise
Œil pour œil et sans dents
La chaleur du dedans
C’est les corps qui la disent

Lunettes embuées
Ils allaient leur traintrain
Au cœur de la ruée
Ils y mirent un frein

Changement de tempo
Cela nous fit vraiment
De mémoir’ de troupeau
Un beau déraillement

Elle est à moitié belle
Et c’est déjà beaucoup
Qu’elle se démusèle
Il en saura le goût

Dans ce grand carnaval
Et malgré leurs bâillons
Leurs cœurs à gros bouillons
Se sont mis en cavale

Le nu d’une pommette
Le reste qu’on devine
L’échancrure est discrète
Les lèvres se dessinent

Bas les masques, haut les pattes
Nous n’en saurons pas plus
La foudre qui éclate
Se passe de laïus

Ils sont à moitié beaux
Chirurgiens d’opérette
Opérant de facto
Une greffe parfaite

Elle est entièr’ment belle
Cette idée saugrenue
Ce désir sensuel
De leurs visages nus

Philippe Thivet
(05/11/2020)

 

 

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