Sarcicourt

N’ cherchez pas sur la carte
Ce clocher n’y est pas
Mais c’est de là que partent
Les traces de mes pas

J’en ai fait du chemin
Depuis la Grande rue
Où j’ai croqué gamin
Quelques fruits défendus

J’y laisse l’encrier
Des premières ratures
Mes bons points d’écolier
Mes colts et ma monture

Un peu de mes racines
Faisant quelques rejets
Mes heur’s de médecine
Au secret d’un bosquet

Et ce ruisseau qui court
En bas de Sarcicourt

Le nom ne vous dit rien
De ce centre du monde
Ce n’est qu’un patelin
Qui se perd à la ronde

J’en ai croisé bien d’autres
Et de bien plus illustres
Des tout comme le votre
Quittés depuis des lustres

On n’y laisse nos parts
De genoux écorchés
De petites histoires
Et de vies amochées

Des étés infinis 
Aux senteurs de moisson
De longues heur’s d’ennui
Des coins à champignons

Et ce ruisseau qui court
En bas de Sarcicourt

C’est un trou de verdure
Où dorment des fantômes
Une terr’ d’aventure
Un enfantin royaume

J’en ai gardé le goût
De mon premier baiser
Et soit dit entre nous
Les feux de la fessée

J’y laisse l’innocence
De quelques jeux d’ado
L’écho du Tour de France
Passant à la radio

La vieille micheline
Et son chemin de fer
Une ombre qu’on devine
Au fond du cimetière

Et ce ruisseau qui court
En bas de Sarcicourt

Au temps du G.P.S
Vous avez une chance
De loger cette adresse
Sur la carte de France

J’en ai pris mon envol
Dans quelques turbulences
Et à ce droit du sol
Je ne fais allégeance

Mais j’y laisse à tout prendre
Bien plus que je ne pense
Une poignée de cendres
Et de pesants silences

Quelques êtres que j’aime
Un frère et une sœur
Mes tout premiers poèmes
Et un bouquet d’odeurs

Et ce ruisseau qui court
En bas de Sarcicourt

Philippe Thivet
(12/03/2019)