D’argile

Que le vent se lève
Il gonfle nos voiles
Ou jette à la grève
Selon notre étoile

À chaque seconde
En équilibriste
S’avance le monde
Pour son tour de piste

Tout peut basculer
D’un instant à l’autre
Ainsi bousculé
Le danseur se vautre

Un coup de ciseaux
Interrompt le fil
Nous étions oiseaux
Nous voici d’argile

Qu’un nuage passe
Il se fait ombrelle
Ou noie de sa masse
La mariée trop belle

Le cœur à la fête
Ivre de lumière
Au feu des comètes
Danse l’éphémère

Quand finit la noce
Déjà tout vacille
On se veut colosse
On est que brindille

Un coup de ciseaux
Interrompt le fil
Nous étions oiseaux
Nous voici d’argile

Que tourne le vent
Nous  sommes girouettes
Grinçantes souvent
Ou sonnant trompette

Nous étions fraudeurs
De tous les voyages
C’est soudain l’erreur
La voie de garage

Le temps nous étreint
Nous prend dans ses mailles
La vie va son train
Puis soudain déraille

Un coup de ciseaux
Interrompt le fil
Nous étions oiseaux
Nous voici d’argile

Que tourne la roue
Au gré des ornières
Quand même la boue
Retombe en poussière

Un rai de lumière
Fauche l’acrobate
Tombant comme pierre
Sans fil à la patte

Nous étions les rois
De ce chapiteau
Le hasard nous broie
Au dernier salto

Un coup de ciseaux
Interrompt le fil
Nous étions oiseaux
Nous voici d’argile

On en fait des tonnes
On vit à grand bruit
Puis un téléphone
Déchire la nuit

Philippe Thivet
(29/03/2021)