Poisson d’avril
Qu’importe le flacon
Pourvu qu’on ait l’ivresse
De l’avis du poisson
On peut penser l’inverse
Qu’il pleuve à gros bouillons
Son horizon s’étend
La pluie jetant des ponts
Du bocal à l’étang
C’est l’histoir’ d’un poiscaille
Dont la vie tourne rond
Passant entre les mailles
De nos jours du poisson
Une vie d’aquarium
Nourri, logé, pépère
A mâcher du chewing-gum
Loin des dents de la mer
Pourquoi rêver au fond
Dans sa ronde sans fin
De sauter au plafond
Tel un parfait dauphin?
C’est l’histoir’ d’un poiscaille
Coinçant un peu la bulle
En jetant à la baille
Ambitions et scrupules
Lui sans plus d’appétit
Qu’un vieux barracuda
Traîne son clapotis
En snobant les appâts
Loin des filets de pêche
Et de jus de citron
Fait danser les flammèches
De son beau vermillon
C’est l’histoir’ d’un poiscaille
Attendant le déluge
En rêvant de corail
Où trouver son refuge
Que fonde la banquise
Il se ressert un ver
Chaque goutte reprise
Accroît son univers
Mais un poisson d’eau douce
A l’âme suicidaire
Lorsque l’ennui l’y pousse
Pleure de l’eau de mer
C’est l’histoir’ d’un poiscaille
Mort un premier avril
Dans son tricot d’écailles
Se découvrant d’un fil
Philippe Thivet
(06/04/2018)