La mer est à portée de main

Au goutte à goutte de l'averse
De ce chagrin qui nous transperce,
A chaque pas de grain en grain,
La mer est à portée de main.

De l'eau perlant au bout des cils
Au caniveau qui prend son temps,
Voici qu'à toutes fins utiles,
La mer est là qui nous attend.

C'est un ruisseau sous nos paupières,
Un fleuve immense à notre échelle,
C'est un torrent roulant ses pierres,
Portant déjà ce goût de sel.

Où que l'on soit, d'où que l'on vienne,
Toutes les eaux nous y ramènent.
A chaque pas de grain en grain,
La mer est à portée de main.

Du chant joyeux de cette source
Au moindre faux pas de sa course,
Par ce filet de trois fois rien,
La mer est à portée de main.

Suivant le partage des eaux
Se découpant sous notre ciel,
Dans les échos de nos sanglots,
La mer est là qui nous appelle.

Ce n'est qu'un voilier de papier
Au vent de nos rêves d'enfant,
D'où l'on n'a jamais débarqué,
Pas tout à fait, jamais vraiment.

Où que l'on soit, d'où que l'on vienne,
Toutes les eaux nous y ramènent.
Par ce filet de trois fois rien,
La mer est à portée de main.

Des eaux usées de notre corps
Perlant par chacun de nos pores,
Sous le déluge ou le crachin,
La mer est à portée de main.

Suivant les sillons de nos peaux
Jusqu'aux tourments de l'embouchure,
Jamais à court de nos cours d'eau,
La mer est là dans ce murmure.

C'est une perle de rosée
Roulant dans le petit matin,
Qui fera le jeu des marées
A l'autre bout de son chemin.

Où que l'on soit, d'où que l'on vienne,
Toutes les eaux nous y ramènent.
Sous le déluge ou le crachin,
La mer est à portée de main.

Dans les eaux troubles de nos mères
Ou cendr's au fil de la rivière,
A chaque instant un peu moins loin,
La mer est à portée de main.

Philippe Thivet
(12/10/2005)