Amazonie

C'est une terre à l'horizon
Dans les éclats d'un soleil d'or,
Là où le monde devint rond
Aux mains des grands conquistadors.
Et se sont-ils agenouillés
En pénétrant ce sanctuaire,
Quand l'Amazon' belle inviolée
Leur déroulait ses grands bras verts ?
Au nom de Dieu, au nom du roi,
Au nom de la loi du plus fort,
Sortie des brumes d'autrefois,
Leur ombre là-bas plane encore.

Est-ce ta vie qui coule
Par cette artère à ciel ouvert,
Quand ton âme s'écroule
Au rythme fou de leurs prières ?
Amazonie, Amazonie,
Poumon percé de part en part.
Amazonie, Amazonie,
Ta route va-t-ell' quelque part ?

Un peu de sang dans l'eau du fleuve,
Sans dout' pour mieux sauver les âmes,
Quand les sauvag's font ce qu'ils peuvent,
Les colons font parler les armes.
Au pied des arbres millénaires
Pleurant des larmes de latex,
Les richess's de cet univers
Ont bien de quoi laisser perplexe.
Etranger sur ta propre terre
Où donc es-tu seringuero ?
Toi locatair' de ta misère
Jusqu'à l'ultime centavo.

Est-ce ta vie qui coule
Par cette artère à ciel ouvert,
Quand tes indiens s'écroulent
Au rythme fou des revolvers ?
Amazonie, Amazonie,
Poumon percé de part en part.
Amazonie, Amazonie,
Ta route va-t-ell' quelque part ?

Au long de ce chemin de fer,
Traînée de rouille abandonnée,
De la splendeur à la misère
Trônent les ruines du passé.
Là où la terre et ses filons
Ont auront fait tourner des têtes,
Dans la valse des migrations
Soufflant comme un vent de tempête.
Broyant les homm's et leurs espoirs
Entre ses mains de conquérante,
Ainsi se répète l'histoire
De l'humanité chancelante.

Est-ce ta vie qui coule
Par cette artère à ciel ouvert,
Quand ta pur'té s'écroule
Au rythme fou de leurs affaires ?
Amazonie, Amazonie,
Poumon percé de part en part,
Amazonie, Amazonie,
Ta route va-t-ell' quelque part ?

En quelques siècl's et des poussières,
Dans les éclats du Grand Para,
Le paradis s'est fait enfer,
Et la forêt marque le pas.
Quand balafré de macadam,
Ce pays saigne à tous les vents,
Contre les eaux, contre les flammes,
Contre les hommes simplement.
Et le climat dans ses colères,
Se réchauffant de bois précieux,
Regarde s'essouffler la Terre,
Et l'Amazon' fait ce qu'ell' peut.

Est-ce ta vie qui coule
Par cette artère à ciel ouvert,
Quand ta forêt s'écroule
Au rythme fou des bulldozers ?
Amazonie, Amazonie,
Poumon percé de part en part,
Amazonie, Amazonie,
Ta route va-t-ell' quelque part ?

Amazonie, Amazonie,
Poumon percé de part en part,
Amazonie, Amazonie,
Ta route ne va nulle part.

Philippe Thivet
(20/03/2005)